Les masques, ou l’attitude stratégique du pervers narcissique

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Un individu névrosé, ou « normalement constitué », est capable de ressentir une large gamme d’émotions très diverses, et possède un certain Quotient Émotionnel (QE) qu’il est d’ailleurs possible de quantifier. De plus, il aura appris la plupart des codes relationnels, comportementaux et cognitifs lors de l’enfance, puis sera capable en approchant l’âge adulte d’avoir une attitude plus ou moins empathique et sociale.

Un individu pervers, lui, ne fonctionne pas vraiment de la même manière. Pourtant, en apparences, on pourrait s’y méprendre tant les PN sont de fins observateurs et illusionnistes … si on ne regarde pas au-delà de la façade, un pervers narcissique semble ressentir des émotions et peut se faire passer pour quelqu’un de bon conseil. Mais, dès qu’on creuse un peu derrière les apparences, il s’avère qu’ils ne fonctionnent décidément pas de la même façon qu’un individu névrosé.

Le PN est un professionnel du mimétisme et de la théâtralisation. Mimétisme, car il sait imiter les comportements qu’il a pu observer chez d’autres individus. Théâtralisation, car si on le regarde attentivement, il dramatise souvent ses discours et mimiques, à la façon d’un comédien sur les planches d’un théâtre. On pourrait presque l’applaudir.

En fait, le pervers narcissique adopte une attitude qui lui permet de manipuler les gens à sa portée. De plus, doté d’une forte intuition qu’il utilise à des fins malveillantes, il s’adapte à chaque interlocuteur et à chaque situation. Il parvient à lire en l’autre, comme dans un livre ouvert. On l’aura compris, c’est le roi de la manipulation.

Pour ce faire, il utilise pratiquement tous les comportements, expressions et mimiques qu’un névrosé peut avoir. La différence fondamentale entre le névrosé et le pervers, c’est que le névrosé parle et agit naturellement, alors que le pervers parle et agit stratégiquement.

Le PN, par un mécanisme de défense plutôt inconscient, ne souhaite pas se dévoiler et se confier trop intimement, car l’intimité lui fait peur. Pour cela, il usera de stratégies de manipulation, en particulier le mensonge et la déformation de la réalité. Mais aussi, il pourra se montrer sous différents jours, toujours en s’adaptant à son interlocuteur, tout en privilégiant le but qu’il souhaite atteindre.

Par ailleurs, le PN est un être qu’on peut qualifier de vraiment « coupé de ses émotions ». Il ne ressent que très peu d’émotions profondes, et arbore plutôt des émotions de façade. Les seules émotions qu’il ressent profondément sont à priori : la haine, la colère, l’envie, la jalousie, le mépris et la frustration.

Voici une liste non exhaustive, mais assez complète, de tous les masques stratégiques que l’on peut observer tour à tour chez un PN, et l’interprétation que j’ai faite de ces différentes façades.

  • Charmant, séduisant, sympathique, souriant, fait de nombreux compliments = l’attitude du début bien souvent, très présente en période de séduction, le prince charmant arrivant sur son beau cheval blanc.
  • Empathique, compréhensif, compatissant, à l’écoute = l’attitude du sauveur, qui est là pour nous tendre la main : « Je vais te sauver de ton passé, de tes problèmes ; tu verras, avec moi, tout va s’arranger ».
  • Indifférent, blasé, renfrogné, feigne de ne pas voir ou ne pas entendre = l’attitude très présente au quotidien, qui s’installe de plus en plus durablement au fil du temps, très bonne stratégie pour frustrer et déstabiliser sa proie.
  • Passionné par une occupation, un paysage, un lieu, semble apprécier la nature ou un endroit = la seule attitude qui laisse un moment de répit à l’entourage, car le PN centre son attention sur autre chose d’intéressant et concret.
  • Menaçant, parle à voix basse, monologue, communication floue et incohérente, ton hypnotique = l’attitude pour semer la confusion, le doute, culpabiliser et détruire avec des mots, ce masque revient très régulièrement ; dans ces moments, la paranoïa du PN s’exprime clairement, et il a tendance à se positionner en victime : « Tout le monde me veut du mal, tout le monde me fait souffrir, tout le monde me rend dingue … ».
  • Boudeur, en mode gamin capricieux, silencieux pour faire revenir l’autre = l’attitude qui suit souvent la précédente (monologue), ou lorsque le PN veut punir sa proie et la faire revenir vers lui.
  • Angoissé, stressé, ronchonne, se ronge les ongles = l’attitude qui traduit leur angoisse et leur frustration intérieures, les PN ont tendance à être très pessimistes.
  • Enragé, colère immense, violent, voix très forte, rempli de haine, intimidant, regard de tueur = l’attitude lors de véritables crises de rage où le PN peut avoir des gestes violents. Il évite cela et surtout en public, pour préserver sa belle image, mais dans l’intimité le PN peut passer à la violence matérielle (jeter ou casser des objets) et parfois à la violence physique. Mais cette attitude reste ponctuelle chez le PN, et assez espacée en termes de fréquence. Mode tyran ou bourreau clairement déclaré.
  • Critiques, jugements, dévalorisations des autres, se prend pour le « détenteur de la vérité absolue », projette ses propres défauts sur les autres, parle de façon théâtrale et « névrosée » = l’attitude qui permet au PN de se sentir supérieur aux autres, un de ses sujets de conversation favori.
  • Moqueries méchantes déguisées en humour = l’attitude pour se moquer en toute impunité « Mais c’est de l’humour, t’as pas d’humour ! » le tout en riant.
  • Air sournois, autosuffisant, vaniteux, narcissique, avec un sourire pervers et victorieux = l’attitude quand il se sent tout-puissant, souvent suite à une petite victoire personnelle gagnée grâce à la manipulation.
  • Timide, réservé, discret, ne parle presque pas, voix toute douce = l’attitude pour se faire passer pour inoffensif, attendrir, s’effacer, stratégie pour se retirer d’une conversation.
  • En pleurs, triste, angoissé (parfois crise d’angoisse) = l’attitude très rare chez le PN, étant insensible il ne pleure que par stratégie, pour porter le rôle de la victime et apitoyer. Souvent rattachée à une blessure narcissique = si il sent que sa proie s’éloigne, ou alors pour se faire passer pour quelqu’un de sensible … et ça marche 90% du temps, « c’est tellement mignon un homme qui pleure », n’est-ce-pas ? Sauf que quand on est face à un PN, ça devient vite moins « mignon », et notre « cœur grenadine » en prendra un coup par la suite.
  • Air pitoyable, penaud, gamin pris en faute, s’excuse = l’attitude pour simuler la culpabilité et la honte.
  • Expression de folie sur le visage, air absent, fixe dans les yeux et fait tout pour capter entièrement l’attention de sa proie (lui tenir les bras, par exemple) = l’attitude pour hypnotiser, le PN sait pratiquer une forme d’hypnose très néfaste bien sûr, et qui n’a rien à voir avec l’hypnose thérapeutique.

A première vue, ces comportements ressemblent presque à ceux d’un individu normal. Mais ce sont évidemment des attitudes stratégiques et calculées. Il n’y a jamais aucune spontanéité chez le PN ; vous pouvez toujours chercher, vous n’en trouverez pas. On pourrait presque dire que la manipulation est son seul mode de communication. C’est un vrai caméléon, qui change de couleur en fonction de son intérêt narcissique.

Enfin, ce qui est déstabilisant avec le pervers narcissique, c’est qu’il peut passer d’une attitude stratégique à une autre très rapidement, en à peine quelques minutes. Le PN est imprévisible, et le glissement d’un masque à un autre provoque l’effet de surprise et la sidération chez sa proie. Celle-ci est alors paralysée, ce qui permet au PN de resserrer son emprise et d’alimenter la confusion mentale de l’interlocuteur.

5 réflexions sur “Les masques, ou l’attitude stratégique du pervers narcissique

  1. Pingback: Les masques, ou l’attitude stratégique du pervers narcissique – Le Blog a Sofeee

  2. Excellent !!! tout simplement ! J’ai identifié mon pervers à sa première tombée de masque. Impressionnant ….l’effet destructeur suivi de la séduction total. Incroyable et paralysant effectivement. Par contre, après quelques jours de remise avec moi-même …je l’ai larguer …. tout cela après 18 mois où il se cachait de son véritable lui. Le maudit ….

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